Marquées par des altérations argentiques, ces images traduisent ma tentative de capturer les fantômes et esprits du paysage japonais, en écho à la croyance du kamikakushi — l’enlèvement par les esprits — qui a nourri ma recherche durant ma résidence de trois mois au Koganecho Art Center à Yokohama (2024). Le projet a été exposé dans le cadre de ma première exposition personnelle à la Dark Gallery, à Copenhague.
Avec I was looking for a Ghost and I found its Silver bones, je cherche à faire émerger l’invisible tout en laissant le visible nous glisser entre les doigts. J’initie une conversation visuelle entre ce que nous voyons réellement et la manière dont nous le voyons. Comme une interprétation poétique de l’enlèvement spirituel, j’invite à une contemplation des images qui, d’une manière ou d’une autre, seront elles aussi emportées par l’esprit de la lumière et du temps.
Issues de divers marchés aux puces à Tokyo, Yokohama, Kyoto et Osaka, ces photographies portent toutes les traces de ce que les restaurateurs appellent le voile argentique (Silver Mirroring) : un phénomène où les ions d’argent présents dans le papier réapparaissent à la surface, signe du vieillissement et de mauvaises conditions de conservation.
La peinture noire sur laquelle elles sont présentées reflète peu — voire pas — de lumière, créant un fond semblable à un vide qui accentue l’éclat de l’argent. Les reflets se révèlent davantage sous certains angles, invitant le spectateur à s’approcher, à se déplacer, à chercher activement ce qui échappe habituellement à l’œil nu.
Délicatement épinglées sur le bois, comme des papillons iridescents sous verre, je fais subtilement référence au punctum de Barthes.
Suivant une esthétique de l’accumulation des instants — du temps passé et révolu — j’emploie une approche de la mise en abyme temporelle, considérant ces photographies comme des réservoirs de temporalité. À certaines compositions, j’ai ajouté des écailles de nacre.
Inspirée par la technique du raden, que j’ai découverte lors de ma résidence, j’expérimente avec la nacre comme une autre matérialisation du temps. Tout comme les anneaux des arbres marquent le passage des années dans le bois, chaque cercle, ligne et nœud de la coquille représente le tampon temporel de l'océan — un enregistrement du temps qui passe dans la vie de ce matériau.
Sa nature iridescente dialogue avec l’éclat subtil de l’argent, ajoutant une autre couche de matérialité aux esprits.
Au fil du temps, à mesure que les fantômes s’estompent, l’image se dégrade, et l’argent qui existait avant la prise de la photographie retourne à sa place originelle sur le papier.

























